dimanche 26 juillet 2009

ami yoshida




Artiste : Ami Yoshida
Titre album : Tiger Thrush
Année : 2003
Label : Improvised Music from Japan

Lorsqu’elle évoque le travail qu’elle effectue avec sa voix, Ami Yoshida parle de hurlement. Mais elle parle aussi de braillement et de mugissement. Pour ma part, j’aurais aussi employé les termes de cri, de vocifération, de murmure, de sifflement, de râle. Le terme anglais qu’elle utilise d’ailleurs pour parler de son organe (« howling voice ») est en lui-même tellement polysémique qu’il semble autoriser l’inflation du vocabulaire. Mais cette inflation n’est pas indue. La voix d’Ami Yoshida, cette artiste de l’avant-garde japonaise, semble en effet contenir tout ce que le monde compte de déchirements, de brûlures et de démesure.
Et c’est sans doute parce qu’elle parfaitement consciente des possibilités de sa voix que l’artiste japonaise a décidé de lui consacrer un album entier, Tiger Thrush . Mais pas un album au sens où on l’entend habituellement avec des titres qui s’enchaînent, avec une progression plus ou moins maîtrisée. Tiger Thrush , avec ses 99 pistes le plus souvent très courtes, sans jamais de titre, ressemble davantage à une sorte de cabinet de curiosité sonore dédié à la voix. Dans ce disque sans la moindre mélodie, l’artiste japonaise y donne à entendre tout ce que sa voix peut créer en terme de textures et de bruits : chants d’oiseaux inconnus sur la terre, paysage industriel, cri étouffé, râle, rythmes gutturaux, braillement d’enfant, source d’eau clair, et j’en passe. Le travail, surprenant, étrange, conduit même à nous faire oublier que c’est bien une voix que l’on est en train d’écouter. Mais attention, ne jamais imaginer que l’on a ici affaire à une sorte de ventriloque ou une performeuse de foire. Non. Et Ami Yoshida fait aussi plus que se mettre à nue . Elle dissèque, sous nos oreilles, sa propre voix. Elle la torture pourrait-on dire. Elle en révèle en tous les cas les failles les plus terrifiantes, les profondeurs inexplorées, les ravissements irréels. Elle en dévoile aussi, bizarrement, les possibilités de maquillage (et pas seulement parce qu’elle s’accompagne parfois de sons électroniques) et donc les faux-semblants. Elle construit ainsi l’œuvre la plus déroutante qui soit grâce à l’instrument le plus banal qui soit. Une œuvre qui, au-delà de la fascination qu’elle fait naître, renseigne à la fois sur les territoires d’extension à venir pour la musique et, plus profondément, sur ce que l’homme a toujours été au plus profond de son être.
de http://www.laptitemaison.com/ptitemaison/article.php3?id_article=409

samedi 25 juillet 2009

Maja Raktje


"Voice"(Rune Grammofon / ECM), le premier album de Maja Raktje, projet centré sur la voix. Et autant dire que cette artiste (connue pour ses méfaits au sein du quatuor féminin Spunk) n'a pas froid aux yeux. Par le seul usage de sa voix, cette jeune femme dépasse l'entendement esthétique et nous propose un exercice de cut-up vocal de haute volée. Difficile en effet de rester indifférent aux charmes de sa voix tour à tour criarde, douce, stridente ou harmonieuse. Enregistrée et retravaillée sur différents supports (dictaphone, minidisc, sampler...), elle peut ainsi se parer d'une candeur intrigante comme se métamorphoser en une tornade hystérique et cacophonique. Le registre est large et l'effet produit sur l'auditeur des plus troublants. Dans un tel contexte, plusieurs écoutes permettront d'apprécier toute la finesse et l'audace de l'ouvrage. Possédant un passé musical impressionnant (dans les domaines de la country, la fanfare, le jazz, le tango ou l'électronique) et multipliant aujourd'hui les collaborations avec d'autres compositeurs contemporains (Jazzkammer), Maja risque de faire encore parler d'elle, dans Solénoïde et ailleurs. Pour son impudence et sa splendeur, «Voices» est un album qui pourrait vous laisser... sans voix!

de http://www.solenopole.org/ratkje.htm

le grain de la voix Barthes


Roland Barthes est un musicien du toucher, un pianiste amateur qui recherche une certaine qualité de jeu sans pour autant chercher à le dresser car le "dressage empêche la jouissance". Pour lui, il y a deux musiques : celle que l'on écoute et celle que l'on joue. Composer, selon Barthes, c'est avant tout "donner à faire" et l'interprétation, aussi neutre qu'elle puisse être, est une forme d'écriture dans l'instant, sans esprit de maîtrise ni de compétition ; elle procède d'un art du déchiffrage, lié au plaisir du "texte musical", dont la lecture doit être à chaque fois renouvelée.
Barthes s'était d'autant plus consacré au piano que sa vocation de chanteur avait été très tôt interrompue par la maladie ; Charles Panzera, un des plus célèbres chanteurs de mélodies de l'entre-deux-guerres lui avait donné des cours et Barthes lui rendra hommage à de nombreuses occasions, notamment dans un de ses essais les plus remarquables : Le Grain de la voix. "Le "grain", écrit Barthes, c'est le corps dans la voix qui chante, dans la main qui écrit, dans le membre qui exécute". Paradoxalement, ce texte qui a été publié en 1972 dans une revue musicale d'avant-garde propose une remise en question de l'importance de la "rupture tonale accomplie par la modernité".
Barthes musicien écrivant sur la musique se révèle singulier et anticonformiste (amateur anti-héros et artiste contre-bourgeois, selon ses propres termes). Loin d'être conservateur, malgré son goût revendiqué pour la musique romantique et les mélodies "fin de siècle", il ouvre des pistes et remet en question bien des certitudes apprises. Les musiciens de "l'œuvre ouverte" comme André Boucourechliev seront finalement ses meilleurs interlocuteurs possédant comme lui un sens du jeu et une approche sensuelle de la pratique musicale.

par Christian Rosset
franceculture.com

kristeva et artaud





et ce documentaire génial de Gérard Mordillat et Jérôme Prieur avec notamment paule thevenin, celle qui s'est occupée de lui, à ivry...

mercredi 22 juillet 2009

joan la barbara / cathy berberian


Joan La Barbara est un personnage à part dans le monde de la musique classique. Que ce soit à travers son association avec des compositeurs comme John Cage, Steve Reich ou Morton Feldman, ou sa propre carrière de compositrice, elle s’est construit une place unique de chercheuse et d’expérimentatrice. Depuis les années soixante, elle a consacré sa vie à explorer la voix humaine, à commencer par la sienne, afin d’en élargir les possibilités et d’en repousser les limites. Elle a ainsi développé un vocabulaire étendu de techniques vocales expérimentales, ajoutant le chant circulaire (chant ininterrompu par la respiration), le hululement, les claquements de glotte, le chant multiphonique (chanter sur plusieurs tonalités à la fois) aux techniques traditionnelles du chant classique. À l’inverse du chant lyrique, elle considère la voix, non comme un véhicule du texte, mais comme un instrument en soi. Ce qui l’a amenée à composer et interpréter des œuvres étonnantes, associant une forme de chant « pur », quasiment angélique, à des grognements, des évocations d’animaux, de machines, des imitations de sons électroniques. Ses propres compositions sont, non seulement des démonstrations virtuoses de ses capacités vocales et de son talent, mais aussi des pièces excessivement sensibles, explorant la texture sonore de la voix de manière envoûtante.

Voice Is The Original Instrument est une compilation de ses premières oeuvres, enregistrées dans les années 70 et 80, et présente l’artiste expérimentant diverses techniques de production sonore, vocale et technologique, mais aussi diverses sources d’inspiration inhabituelles, improvisant après des périodes de privation sensorielle, traduisant en son des analyses du spectre lumineux. L’album est aussi une introduction en forme de manifeste à ce qui sera la voie de Joan La Barbara tout au long de sa carrière. Elle y envisage le son comme une présence physique, un matériau à sculpter. Elle dit vouloir « retrouver la fonction de base de la voix en tant que premier instrument d’expression » et comme ressource sonore encore trop peu explorée. En plus de ses techniques vocales, elle explorera le re-recording, additionnant jusqu’à seize couches de sa propre voix pour parvenir à une composition orchestrale complexe, une réelle « peinture sonore ». C’est le titre qu’elle donnera d’ailleurs à un de ses albums : Sound Paintings, un disque s’ouvrant sur un cri perçant, pour s’engouffrer ensuite dans une série de pièces tantôt méditatives, tantôt emportées à toute vitesse dans une fougue rappelant diverses traditions populaires, comme Erin, évoquant l’Irlande, ou Urban Tropics, où elle utilise sa voix comme un instrument de percussion afro-cubain.

Malgré la réticence de beaucoup de compositeurs à écrire pour une interprète aussi unique que La Barbara, quelques-uns se sont risqués au défi. Une de ces plus belles collaborations est une œuvre de Morton Feldman intitulée Three Voices. Les paroles sont extraites des deux premiers vers de Wind, un poème que l’écrivain Frank O'Hara avait dédié à Feldman. Le texte est adapté pour trois voix, l’une chantée live, les deux autres enregistrées. Elle fut interprétée par La Barbara, chantant entourée de deux haut-parleurs. Feldman expliquera plus tard avoir eu la vision des haut-parleurs comme autant de pierres tombales, et qu'il avait conçu la voix live comme conversant avec des esprits. Pour lui, c'était les voix de ses amis Philip Guston et Frank O'Hara qui y étaient enterrées; la voix live était la sienne. Il y a toujours eu beaucoup de similitudes dans les approches musicales de Feldman et de La Barbara. Elle a créé au fil du temps un style vocal minimaliste, tout en retenue, qui rappelle la subtilité et l’économie caractéristique de Feldman.

Une autre de ses oeuvres majeures est une collaboration également. 73 Poems est basé sur un texte du poète américain Kenneth Goldsmith, par ailleurs fondateur d’UbuWeb (http://www.ubu.com). Il s’agit d’une œuvre pour voix, électronique et bande, composées de 79 pièces courtes, entre le haïku et la miniature, durant chacune une minute à peine. Il s’agit également d’une exception au travail habituel de La Barbara puisqu’elle avait jusque-là évité l’usage du texte. Alors qu’elle favorisait auparavant les séquences vocales dénuées de signification, et en ce sens similaires à une musique instrumentale, elle utilise ici l’humour ou le pathos des textes pour se livrer à des variations sur les différentes rimes et allitérations des poèmes ou pour se concentrer sur une forme de récitation uniquement accompagnée de manipulationsd’harmoniques. Les poèmes originaux de Goldsmith, conçus comme des intermédiaires entre la poésie et la peinture, sont disposés sur le papier comme une composition abstraite, les mots se superposant, dessinant des formes géométriques. Chacun possède, en dehors de son texte, un agencement visuel, une esthétique propre. C’est de cet agencement que partira La Barbara pour son adaptation, cherchant à sculpter le son en accord avec la composition graphique du poème.

La musique de Joan La Barbara, bien qu’elle soit le résultat d’années d’expérimentation, conserve une fraîcheur, une beauté inhabituelle, qui parlent à l’imagination. Décrite par certains critiques comme "l’équivalent sonore de la science-fiction", elle est une exploration des territoires inconnus de la voix. Qu’elle se base sur des techniques traditionnelles comme le iodle, le jeu de gorge des Inuits ou le chant diphonique de Mongolie, ou qu’elle invente ses propres techniques, l’agilité et l’aisance de La Barbara sont toujours impressionnantes. À la fois compositrice et interprète, et ne craignant pas de mêler à son approche classique improvisation et technologie, Joan La Barbara est un exemple rare, marginal, dans le monde de la musique classique. Au moyen de sa seule voix, elle s’est créé un univers déconcertant, fascinant et « rafraîchissant », où l’on ressent la joie de chanter, de s’immerger dans le son et de découvrir des sons que l’on croyait jusque-là impossibles. [retour]

Joan La Barbara possède un site internet : http://www.joanlabarbara.com/. Elle travaille actuellement sur un nouvel opéra, intitulé WoolfSong, inspiré par la vie et l’œuvre de Virginia Woolf.

Discographie sélective
- Joan La Barbara : « Voice Is The Original Instrument » - XL010A
- Joan La Barbara : « Sound Paintings » - XL010C
- Joan La Barbara : « Shamansong » - XL010E
- Joan La Barbara & Kenneth Goldsmith : « 73 Poems » - XL010D
- Steve Reich : « Drumming / Six Pianos / Music For Mallet Instruments, Voices and Organ » (1974) - FR3396
- Philip Glass : « North Star » (1977) for multiple voices - XG366D
- Morton Feldman : « Three Voices for Joan La Barbara » (1982) - FF3425
- Morton Subotnik : « Touch 1969 / Jacob's Room 1986 » - FS9132
- John Cage : « Singing Through » (1990) - FC0626
Benoît Deuxant

de http://www.lamediatheque.be/dec/portraits/joan_la_barbara.php?reset=1&secured=



Mezzo-soprano américaine - Attleboro, Massachusets, 4 juillet 1925


" Je suis anti-conformiste, je suis rebelle et je refuse d'accepter ce que je ne crois pas vrai. Je ne veux pas être prisonnière d'un seul répertoire." C. BERBERIAN

Cathy BERBERIAN est une diva pas comme les autres, se produisant parfois avec des cheveux roses et de gigantesques faux cils, poussant des cris d'animaux et des grognements, ou encore confrontant Monteverdi avec les Beatles. Mais ne nous y trompons pas ! Elle est avant tout une géniale professionnelle de la musique de son temps.

Tout commence à l'âge de deux ans, dans une famille d'origine arménienne, avec la petite Cathy qui passe son temps à grimper sur la table familiale pour y interpréter avec succès la célèbre chanson " Ramona ". Plus tard, nous la retrouvons aux Universités de Columbia et de New York où elle étudie le chant, la pantomime, le théâtre, la littérature ainsi que la danse espagnole et indienne. En 1950, elle obtient une bourse Fulbright et décide de se fixer à Milan où elle effectue de très sérieuses études de chant avec Giorgina del Vigo.

Cathy devient l'épouse de Luciano Berio en 1950. Le célèbre compositeur est le premier à découvrir les surprenantes ressources de sa voix. Il lui ouvrira les portes de la musique contemporaine et lui dédiera bon nombre de ses œuvres particulièrement " Chamber Music ", " Circles ", " Epifanie ", " Visage ", " Sequenza III " et " Folk songs ".

La carrière de Cathy débute en 1957 à Naples où elle obtient ses premiers engagements. Mais c'est en 1958 à Rome que le monde musical découvre avec stupeur le " phénomène " BERBERIAN dans l'interprétation de l'œuvre surréaliste de John Cage, " Fontana Mix ", comportant une singulière diversité d'effets sonores. La voix de Cathy couvre alors trois octaves, ce qui fait dire à un critique qu'elle peut interpréter aussi bien Tristan qu'Isolde. A propos de cette étonnante tessiture, Cathy explique qu'à sept ans, elle passait son temps à écouter les disques d'opéras de sa mère : " Je chantais avec les disques. Je chantais avec Galli-Curci, Lily Pons, Chaliapine, je chantais même avec Caruso, Giuseppe de Luca. J'étais entourée des meilleurs chanteurs. Et personne ne me disait : on ne peut à la fois être soprano colorature et basse. Et c'est comme cela que j'ai préparé ma tessiture, trois octaves ! ".

Ses débuts aux Etats-Unis ont lieu à Tanglewood en 1960 avec " Circles " de Berio.

En 1966, Cathy et Luciano Berio se séparent mais toute leur vie, ils resteront unis musicalement. La même année, l'étonnante Cathy s'improvise compositrice d'avant-garde avec " Strispody ", collage d'onomatopées assez cocasse inspirées de la bande dessinée. Elle est aussi l'auteur de " Morsicat(h)y " (1971) et " Awake and Read Joyce " (1972).

Cathy BERBERIAN devient la vedette des plus importants festivals mondiaux de musique contemporaine tels Venise, Tanglewood, Donaueschingen, Varsovie, Spolète et Ravinia. Elle est également la star des Journées de Musique Contemporaine en 1968 où elle interprète les œuvres de Berio et en 1970 où elle crée les dernières œuvres de Busotti et Cage. Elle fréquente les plus grandes scènes internationales avec la Scala de Milan, Carnegie Hall et le Concertgebouw d'Amsterdam. Pédagogue, elle donne des cours d'interprétation à l'université de Vancouver et à la Reinische Musikschule de Cologne.

Théâtrale et explosive, elle est la coqueluche des compositeurs les plus inventifs et burlesques de son temps. Mais elle aborde aussi le répertoire classique en interprétant avec talent Purcell et Monteverdi : " Je suis critiquée, je sais. On dit : " Oh, elle est bouffonne ! ". Mais je n'ai pas peur, parce que j'ai fait assez pour qu'on sache que je suis aussi sérieuse ".
A lire, de Marie-Christine Vila : Cathy Berberian, cant'actrice (Fayard, 2004, 424 p.).

Biographie réalisée par les services de documentation interne de Radio-France

petit historique

dur dur de commencer ici...
donc, jai commencé par piquer un article de la médiathèque de la communauté française de belgique, que voici...


LA FEMME DANS LA TRADITION


La femme est d’une importance capitale, au même titre que l’homme, dans de très nombreuses traditions à travers le monde. Elle est donc souvent l’instrument de la tradition, artisan indispensable de son prolongement et de son évolution, gardienne d’un savoir ancestral et responsable de sa transmission. Elle est souvent également l’instrument d’un renouveau, voire d’un chambardement des codes stricts d’un ensemble de pratiques qui jusqu’alors semblaient immuables.
Qu'elle joue d’un instrument de musique, ce qui n’est pas rare, ou qu’elle se serve exclusivement de sa voix, elle est là encore instrument, lien direct, contact étroit avec l’instrumentarium traditionnel d’une communauté ou voix humaine palliant au manque d’instrument de musique.

Une question de statut.
La place que peut occuper la femme dans les pratiques musicales liées aux traditions d’une société est directement dictée par le statut réservé aux femmes dans ladite société. Si aucun cas ne peut être généralisé trop facilement, on peut cependant faire quelques remarques qui s’appliquent à l’ensemble du monde et de ses traditions strictes (c’est-à-dire pas les évolutions les plus récentes et les métissages les plus bouleversants, on y reviendra). Partout, les femmes sont plus souvent chanteuses qu’instrumentistes. Dans certaines sociétés, elles ont accès aux instruments ou à certains d’entre eux. Dans ce dernier cas, leur rôle reste encore assez effacé; elles sont accompagnatrices mais rarement solistes. Les femmes jouant la tampura pour accompagner de grands solistes indiens ont toujours eu cette place légèrement en retrait, ce qui n’est pas le cas lorsqu’elles sont chanteuses. Force est de constater que dans la tradition d’Inde du Nord, par exemple, les grands solistes sur instrument sont traditionnellement des hommes. Tandis que de nombreuses grandes voix sont féminines. Tout ceci ne signifie pas nécessairement tabou mais au moins fait de société. Par contre, il est évident qu’en de nombreuses sociétés, ce sont les tabous qui interdisent aux femmes jusqu’à l’approche et même la simple vue de certains instruments de musique. De nombreux peuples vivant au plus profond de l’Amazonie ont un certain nombre de flûtes ou clarinettes qui expriment la voix des esprits. Les jours de rites importants où sont sortis ces instruments, les femmes restent à l’intérieur de leur logement d’où elles peuvent écouter et même dialoguer avec ces “esprits”, mais en aucun cas elles ne peuvent les voir et donc en jouer. Dans des sociétés beaucoup plus proches des nôtres, c’est souvent l’éducation qui s’est mêlée de cette répartition des rôles dans l’exercice des musiques de tradition. Prenez les pays anglo-saxons ou la France. Peu de musiciens professionnels, de ménétriers, de maîtres à danser ont été des femmes. La norme est de voir un violoniste, accordéoniste, cornemuseux, etc. La femme pouvait éventuellement recevoir une certaine éducation qui la dirigeait alors vers la harpe ou peut-être le violon, mais en aucun cas pour un répertoire de danses populaires. Par contre, beaucoup de femmes, de n’importe quelle couche sociale, chantaient et parfois accompagnaient leurs chants sur l’un ou l’autre instrument (encore une fois, la harpe était de bon ton). Et c’est parmi les couches sociales les plus défavorisées qu’apparaissaient les artistes féminines les plus intéressantes et les plus hors norme. Margaret Barry, chanteuse d’origine gitane irlandaise, accompagnait son remarquable chant sur un banjo rugueux et cahotant comme les essieux d’un vieux chariot.
l a fallu attendre des années pour voir apparaître de nombreuses instrumentistes capables de rivaliser avec les hommes sur n’importe quel instrument.

Une question de fonction.
Bien sûr, en certaines sociétés, la femme peut tenir une série de rôles plus ou moins importants, parfois essentiels et sans distinction de sexe. Le cas le plus important est certainement celui des chamans. Au Chili, en Sibérie, dans l’Arctique, en Mongolie..., les femmes peuvent être chamans et donc pratiquer instruments, chants, incantations et autres “exercices musicaux” liés directement aux cérémonies chamaniques et aux séances de guérison. Il semble même qu’au Chili la fonction chamanique soit principalement féminine. La machi détient ce rôle important et est la gardienne du kultrun, le tambour aux pouvoirs chamaniques. En d’autres endroits, le chaman est homme ou femme, sans distinction liée au sexe puisque ce “métier” important d’intercesseur entre hommes et esprits dépend essentiellement d’aptitudes particulières qui relèvent plutôt de l’ordre psychique.
En d’autres sociétés, les femmes ont accès au statut de musicien professionnel ou officiel. L’Afrique occidentale et la place qu’elle réserve aux griots, ces musiciens, conteurs, historiens, n’en a pas exclu les femmes.
En Mauritanie, les iggiw, musiciens et chanteurs professionnels, griots du pays, sont femmes ou hommes. Les femmes jouent les percussions et la harpe ardin, les hommes jouent les luths. Les deux chantent mais de nombreuses voix célèbres sont féminines.
Parfois, dans les sociétés qui ne connaissent pas la caste des griots, les répartitions des tâches musicales accordent cependant une place importante aux femmes. Les Touaregs par exemple sont exemplaires à ce titre puisque les hommes ne jouent traditionnellement aucun instrument de musique. Ils dansent et guerroient, les femmes s’occupant des instruments et des chants poétiques. Elles jouent la vièle imzad et le tambour tindé et chantent ces chants extraordinaires qui s’éclatent en voix superposées, en sons de gorge, en hululements. Ce qui ne signifie pas qu’aucun homme ne joue, aujourd’hui, d’un instrument de musique. On les voit parfois au luth tidinit et de plus en plus à la guitare, tandis que l’imzad et le tindé restent l’apanage des femmes.
En d’autres endroits, les femmes ont un rôle beaucoup plus discret, à peine visible, mais d’une subtilité importante. Si les chants à tambours ou chants dits personnels étaient réservés aux hommes dans les communautés inuit, par contre les femmes aidaient leurs maris à retenir le chant. Elles chantaient donc en général avec lui, le secondant et lui soufflant en quelque sorte les paroles qu’il avait composées. Ce qui fit dire à Rasmussen que chez les Inuit “la femme est la mémoire de l’homme”. Elle ne jouait pas le tambour, elle ne composait qu’exceptionnellement, mais elle chantait et intervenait dans l’exécution du chant.
On voit à ces exemples, que tous les cas sont possibles et que l’organisation de la société est évidemment déterminante dans le rôle et la place de la femme en ce qui concerne les pratiques musicales. Les cas les plus fréquents montrent une division très précise entre les tâches musicales comme entre les tâches quotidiennes. Chacun, homme et femme, tient un rôle précis fait de fonctions diverses, et la conjonction de ces différentes fonctions soit masculines soit féminines fait en principe fonctionner la société de manière optimale. Ce qui est en général vrai aussi longtemps que le système est respecté et qu’aucun ne tente de franchir les limites de son territoire. En musique, les règles sont les mêmes. La femme a traditionnellement son terrain, celui qui lui est réservé, celui dont elle ne s’éloignera pas pour ne pas entrer sur celui de l’homme. En de nombreuses sociétés, les femmes sont confinées aux activités les plus domestiques et les plus familiales. Elles ont donc dans leurs attributions, le rôle de chanter les berceuses, les chants et les jeux pour enfants. Elles ont une série d’activités journalières auxquelles elles associent des chants ou sortes de jeux musicaux qu’elles pratiquent entre elles. C’est ainsi que les femmes Are’Are des Iles Salomon pratiquent d’étonnantes percussions sur l’eau lorsqu’elles traversent une rivière ou lorsqu’elles ont terminé un travail aux plantations. On retrouve d’ailleurs le même type de jeu chez les Pygmées, sans qu’il soit le fait de femmes uniquement (du moins me semble-t-il). Les femmes inuit ont développé leurs techniques de chants de gorge que ne pratiquent jamais les hommes. On peut en dire autant des femmes Xhosa d’Afrique du Sud et de leurs étonnants chants harmoniques. A cela, il faut ajouter une série de pratiques sociales, rites ou cérémonies, dans lesquelles les femmes ont une place à tenir, y compris musicalement. Elles ont alors le devoir d’exprimer, selon des codifications précises, une socialisation féminine, c’est-à-dire représentant cette partie de la société, du moment à vivre et à partager ensemble. L'exemple le plus évident vient de la place importante des rites funéraires dans de nombreuses sociétés. Les lamentations sont très souvent le propre des femmes. Il est quelques exemples rares où l’on entend des lamentations masculines, comme en Géorgie, mais ce sont en général les femmes qui s’occupent d’extérioriser le drame qui touche pourtant l’ensemble du groupe. On parle d’ailleurs de pleureuses dans certaines sociétés.
Parfois, le rôle de la femme et sa fonction de gardienne de la tradition, prennent des proportions importantes du fait d’absences plus fréquentes des hommes. En Russie, par exemple, les hommes étaient souvent appelés à travailler ailleurs, à louer leurs services en ville, à servir vingt-cinq années dans les armées du Tsar (sous Pierre le Grand au XVIIe siècle). Les femmes restaient attachées à leurs traditions comme à leurs terres. Elles en ont conservé, aujourd’hui encore, un répertoire très ancien qui parle comme parle une mémoire tenace lorsque l’histoire est cruelle. Elles chantent, par exemple, des chants de recrutement d’une tristesse extrême qui datent de cette époque de Pierre le Grand.
Enfin, faut-il signaler que les travaux réservés aux femmes ont souvent entraînés la création de styles musicaux propres (et pareillement dans le cas des hommes). Les fameux chants de foulage du tweed pratiqués jadis par les femmes des Hébrides leur étaient propres. Seuls les groupes de travailleuses qui s’esquintaient à rendre la maille du tweed plus serrée pratiquaient cet ensemble de mouvements et de chants gaéliques. On peut trouver beaucoup d’autres exemples, comme tous les chants associés au filage, au tissage, etc. Sans oublier que dans certaines sociétés, les femmes cultivent pendant que les hommes chassent ou pêchent et que dès lors les chants entonnés pendant le travail de la terre peuvent être exclusivement féminins en certains endroits.

Voix musicales - instruments vocaux
La femme instrument est aussi celle qui prête sa voix à une vocalisation fonctionnelle qui n’est pas une chanson à paroles mais plutôt un chant, un appel, une utilisation notamment musicale de la voix. Les femmes des pays scandinaves ont toujours utilisé des appels extrêmement aigus mais en même temps mélodiques, pour appeler ou guider les troupeaux. Le système n’est pas propre aux pays du Nord, sa caractéristique féminine bien. Ce type de chant est passé outre-Atlantique où il a rencontré les field-hollers et autres moyens de communication employés sur les plantations du sud. Les hollers ont toujours été et sont restés un ensemble complexe de techniques vocales (falsetto, yodel, etc.) et de fonctions différentes : appel au travail, appels à la maison, communications de danger, appels du bétail, etc. Femmes et hommes se les ont partagés aux Etats-Unis. Ces vocalisations de mélodies, en principe sans paroles, ont connu d’autres extensions, plus importantes, lorsqu’il était nécessaire de pallier au manque d’instruments. Il est des exemples étonnants de femmes vocalisant les mélodies et techniques du répertoire des cornemuses d’Ecosse, en de véritables imitations de l’instrument. Ce que font également certaines femmes bulgares. De la même manière, la turlutte, cette façon de chanter une mélodie à l’aide d’une succession d’onomatopées, est une pratique québécoise (venant sans doute de pratiques semblables en Ecosse et en Irlande) qui fut, par exemple, une spécialité croustillante de La Bolduc. Mais si la femme apparaît ici comme instrument, en ce sens qu’elle se substitue à celui-ci, elle n’en a que rarement l’apanage; la règle étant que femmes et hommes sont amenés à pratiquer ce système.
Ici, la voix devient instrument et le chanteur instrumentiste. Il est quelques exemples plus récents de chanteuses qui, sur base d’une tradition ancestrale, ont forgé une expression nouvelle au spectre large. Oscillant entre voix et chant traditionnel d’un côté et voix-instrument, cri ou râle, de l’autre côté, elles créent une démarche personnelle, moderne, engagée, qui leur donne une distance par rapport à la tradition stricte et au rôle traditionnellement réservé à la femme.
Saadet, chanteuse Kazakh, et Sainkho Namtchilak, chanteuse Tuva, ont osé plonger leur œuvre dans une saine utilisation de l’improvisation autant que dans un dosage intelligent du matériel traditionnel. Il en résulte à chaque fois un travail original qui prolonge un savoir-faire ancestral en lui donnant une dimension terriblement actuelle, bousculée, fragile, mais tangible, vraie, qui nous éloigne de toute démarche folklorique ou muséologique. On est, avec ces chanteuses, aussi proche de l’Asie centrale que d’un monde tel que chanté par Diamanda Galas ou Colette Magny.
La voix instrument ne semble être le propre d’aucune communauté précise. Les peuples du monde utilisent leur voix, seul ou en polyphonies, pour en faire un instrument ou un orchestre. Ainsi, les voix des femmes pygmées sont essentielles au tissage de leurs constructions musicales d’ensemble. La communauté tout entière chante. Femmes, enfants et hommes y sont les éléments indispensables d’un orchestre vocal. Chez les Quechua de Bolivie, la voix féminine joue également un rôle essentiel, parce que expression de Pachamama, la terre mère. La femme chante les chants sacrés liés au calendrier agraire, autant que les chants de la vie quotidienne. Une chanteuse comme l’exceptionnelle Luzmila Carpio nous montre à quel point la voix peut devenir instrument, jusqu’à dialoguer, voire rivaliser avec les flûtes, arrivant même à monter plus haut dans les aigus. La voix de Luzmila Carpio sort de temps à autre du cadre strict du chant strophé, comme une rivière sortant de son lit, pour s’en aller pousser la mélodie et sa vocalisation jusqu’au plus haut point d’un horizon musical qui s’avère bouleversant. Ecouter cette chanteuse, c’est se perdre entre flûtes et voix, sauter d’aigu en aigu, monter toujours plus haut sans savoir qui de la flûte ou de la voix nous emmènera plus loin. Il semble que l’instrument s’essouffle avant la chanteuse.

Un statut en question.
Aujourd’hui, comme le montrent déjà quelques exemples cités, le monde éclate en tous sens, entraînant dans son sillage une déstabilisation de nombreuses communautés ayant vécu dans un cadre traditionnel. Loin de moi l’idée d’analyser ici les bienfaits et les catastrophes que cela engendre dans de nombreuses traditions de par le monde. Restons-en au thème de cet article et voyons simplement ce qui se passe en certains endroits en ce qui concerne les expressions féminines.
Il ne faut pas perdre de vue que l’urbanisation et l’industrialisation ont complètement changé le statut de nombre de musiciens et les fonctions d’autant de musiques. Le phénomène n’est pas nouveau. Il suffit de se rappeler les débuts des enregistrements aux Etats-Unis et les premières grandes chanteuses de blues (ce qu’on appelle le classic blues) qui furent enregistrées dans les grandes villes. La femme chanteuse, instrument de spectacle, était reconnue et certainement exploitée. Tandis qu’au Sud, on enregistrait très peu de femmes chanteuses de blues rural. L’avènement d’un style urbanisé peut évidemment fortement modifier le répertoire original. Les chants populaires régionaux du Japon, qu’on appelle min’yô, ont été un moment chantés par les geishas. Ces chanteuses n’étant pas respectées, les min’yô ne furent plus pris au sérieux. Il fallut attendre des mouvements de revival pour leur insuffler à nouveau un autre esprit.
Des changement de société entraînent donc immanquablement des changements profonds dans les pratiques musicales et dans le rôle qu’y jouent les femmes. Il n’est pas nécessaire de se concentrer sur les centres urbains pour déceler des modifications, mais il est nécessaire que les nouvelles conceptions de sociétés, les nouvelles mentalités qui les accompagnent, prennent le temps d’être largement diffusées et d’atteindre les sociétés rurales. Prenez les pays européens, comme la France, la Grande-Bretagne, surtout l’Ecosse et l’Irlande, où certaines traditions ont persisté plus longtemps dans les campagnes. C’est un regain d’intérêt international, ce sont les mouvements de revival, c’est aujourd’hui une certaine mode world music, qui ont ramené ces musiques sur le devant de la scène (d’une certaine scène du moins). C’est aussi bien sûr le travail acharné de quelques grands artistes, chercheurs, groupements, etc. Le résultat est, en tout cas, extrêmement tangible aujourd’hui. La qualité des musiciens “traditionnels” de pays comme ceux cités mais aussi comme les pays scandinaves ou ceux de l’ancien bloc de l’Est (particulièrement la Hongrie), devient étonnement exceptionnelle. D’autre part, on découvre de plus en plus de femmes, voire de très jeunes femmes, parmi les meilleurs instrumentistes actuels. Prenez la discographie d’il y a trente ans ou plus, les grands violonistes, accordéonistes, cornemuseux… étaient des hommes. Peu, voire pas de femmes, sinon discrètes, ou chanteuses. Aujourd’hui, c’est le bombardement. On a vu surgir une flopée de jeunes musiciennes rien que pour les îles de la Grande-Bretagne et l’Irlande : Sharon Shannon et son accordéon mais aussi son violon, Kathryn Tickell à la cornemuse du Northumberland et au violon, Eliza Carthy, grande chanteuse mais encore violoniste, etc. Citer des noms est un exercice facile, le but n’est pas là. Il semble évident que les barrages ont rompu et que la génération actuelle se sent enfin à l’aise avec une tradition liée à un patrimoine jusque-là rural et ancestral. Maintenant, ce patrimoine fait partie de l’ensemble des musiques accessibles et disponibles, chacun, y compris les femmes, peut y puiser à l’aise et s’en servir à sa façon. Les musiques de tradition font partie de la mémoire musicale commune, au même titre que le rock, le blues, le classique ou le jazz et tout(e) instrumentiste peut s’y essayer. Ce qui est vrai également pour les chanteurs et chanteuses dont la jeune génération est très prolixe aussi.
Le phénomène va plus loin encore lorsque la tradition est plus enracinée dans un concept de société qui donne à la femme une place précise. L’Orient n’est pas l’Occident et pourtant là aussi les femmes sont petit à petit en train de modifier leurs comportements musicaux. Deux exemples me frappent particulièrement. Au Turkménistan, les Bakhshi sont des bardes, poètes-musiciens, chantant les poésies classiques et grandes épopées, en s’accompagnant au luth dutâr. Jusqu’il y a peu, cette fonction était exclusivement masculine. Petit à petit, du fait de la sédentarisation, d’une certaine laïcisation de la société et bien sûr de l’évolution de la condition féminine, les femmes se sont intéressées à ce répertoire, au point que le pays compte aujourd’hui de grandes Bakhshi dont la réputation est nationale. Elles sont devenues essentiellement chanteuses, le dutâr étant toujours joué par les hommes. Qui sait si dans quelques années nous ne verrons pas des femmes bakhshi chanteuses et musiciennes, ou alors cet équilibre entre femme chanteuse et homme instrumentiste est déjà un tel changement, voire un tel progrès, qu’il est préférable de le garder tel quel, notamment parce qu’il n’en exclut plus la femme mais pas non plus l’homme. De la même manière, en Ouzbékistan, Monadjat Yultchieva chante la tradition classique d’inspiration soufie. Elle y interprète des chants jusque-là réservés aux seuls hommes. On apprend également que Malika Ziaeva est la seule femme d’Ouzbékistan à jouer du dutâr et qu’elle a créé une école de dutâr pour femmes parce que, jadis celles-ci pouvaient jouer de cet instrument, mais que la pratique était tombée en désuétude.
Quand on vous dit qu’une tradition figée, ça n’existe pas ! Et les femmes, comme les hommes, sont effectivement instruments de ces évolutions successives qui dynamisent sans cesse les traditions du monde.

Discographie sélective :
- Margaret Barry & Michael Gorman : Her mantle so green - MR0690
-Chants traditionnels des Indiens Mapuche - MI3053
-Aïcha Mint Chighaly, griote de Mauritanie - ML7310
-Hoggar. Musique des Touareg - MJ1535
-Iles Salomon, musiques intimes et rituelles ‘Aré’Aré - MZ8195
-Heart of the forest, the music of the Baka - MK5442
-Le chant des femmes Xhosa - MK2930
-Chants des femmes de la vieille Russie - MU4101
-Bannal, waulking songs - MQ5327
-Folk music in Sweden : Ancient Swedish Pastoral Music - MU6569
-Celtic mouth music - MQ0080
-Saadet : Kara toprak - MX7370
-Sainkho Namtchilak : letters - UN0390
-Luzmila Carpio : Arawi - MG8421
-Sharon Shannon - MR8990
-Kathryn Tickell : The gathering - MQ4285
-Eliza Carthy : Red - MQ1088
-Chants des femmes bakhshi, Turkménistan - MY7863
-Munadjat Yultchieva - MY4995
Etienne Bours
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